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La démocratie participative

Rédigé par L'équipe Koba Civique | 17 nov. 2017 10:03:06

La démocratie participative

Étymologiquement, démocratie participative vient du grec « dêmos » qui signifie peuple, de « kratos » qui peut être traduit par pouvoir ou autorité et du terme latin « participatio » qui veut dire participer. Elle peut alors être définie comme un moyen de permettre aux citoyens de s’impliquer dans les décisions prises dans leur commune.

Ils participent aux débats et ont un pouvoir de consultation comme de décision. Dans ce système, si le pouvoir est délégué à des représentants qui votent les lois, le peuple se réserve le droit d'intervenir et de se saisir lui-même de certaines questions. Les citoyens sont donc consultés sur les décisions les concernant et sont actifs. Mais d’où vient la démocratie participative ? Quel est son mode de fonctionnement ? Comment est-elle appliquée dans les villes ?

 

Les origines de la démocratie participative

 

En France, la démocratie participative est apparue dans les années 1960 pour répondre aux nouveaux conflits urbains concernant certains projets d’aménagement et de rénovation urbaine. En effet, dans l’après-guerre, les reconstructions ont été lancées à grande vitesse entraînant la prolifération de banlieues excentrées et mal-équipes en termes d’écoles comme de commerces. Des dizaines de groupes d’action municipaux (GAM) ont alors vu le jour pour montrer leur mécontentement face à cette situation aux autorités locales et les pousser à réagir. C’est à ce moment que virent le jour les premières manifestations de citoyens qui ont affirmé leur volonté de participer activement aux décisions de leurs municipalités.

Le phénomène s’est encore amplifié après les manifestations de 1968 où les luttes sont devenues plus radicales marquant une réelle scission entre les pouvoirs publics et les citoyens. Les deux partis ayant des positions opposées sur les aménagements urbains, la dégradation du cadre de vie et la crise des logements et du transport.

Parallèlement, la démarche des GAM s’est développée et a abouti à un certain succès puisque certaines municipalités ont mis en place des commissions extra-communales dans lesquelles les citoyens pouvaient exposer leurs points de vue et les confronter à ceux des élus. Si les résultats sont peu significatifs dans l'ensemble, cela a permis de poser les bases de la démocratie participative qui doit reposer sur une coopération entre les élus et des citoyens appartenant à des univers sociaux très différents.

Toutefois, on peut noter l’importance de certains évènements dans la mise en place de la démocratie participative comme la mobilisation des habitants de l'Alma-Gare à Roubaix qui a conduit la marie à retenir le projet mis au point par l’Atelier Populaire d’Urbanisme élaboré par les habitants de Roubaix et leurs experts. Cette première victoire signe le point de départ de la démocratie participative. Ce succès sera d’ailleurs mis en avant par Hubert Dudebout pour mettre en exergue les vertus du mouvement social et participatif.

Le mouvement s’est encore renforcé dans les années 1980 dans la volonté de revitaliser les quartiers sensibles. Une commission pour le développement social des quartiers a alors été créée pour que les citoyens puissent donner leur avis sur les méthodes à adopter pour développer les quartiers. Des commissions sont créées au niveau du quartier concerné par les aménagements, au niveau de la ville et au niveau central. Dans chacune d’elles, élus locaux, responsables administratifs et du développement ainsi que la société civile sont représentés. Les grands projets sont exposés et débattus pour que les grandes orientations soient fixées et les budgets alloués à chaque projet voté. Grâce à cela, le développement social des quartiers peut être perçu comme un laboratoire pour la démocratie participative. Si ces commissions n’ont pas été pérennes, elles ont permis de poser les fondements sur lesquels la démocratie participative s’appuiera par la suite. En effet, ces initiatives ouvrent la voie à une collaboration et à des interactions pérennes entre les institutions et les habitants.

Parallèlement, les citoyens plus éduqués et informés veulent participer aux décisions et donner leurs avis sur les enjeux sociétaux.

Les efforts de ces décennies ont payé dans les années 1990, période à laquelle les pouvoirs publics font participer les usagers dans les projets importants de leur ville. À ce sujet, on peut noter en 1995 la création de la Commission Nationale du Débat Public qui organise des débats entre les citoyens et les institutions dans le cadre de projets comme le tracé de lignes à haute tension, la construction d’un aéroport… des aménagements qui ont un fort impact sur l’environnement. On note également la constitution d’une ingénierie de la participation qui regroupe des experts, des juristes, des chercheurs… qui mettent leurs services au profit des citoyens qui manquent de compétences dans leur domaine.

La démocratie participative veut donc s’imposer comme la solution pour remédier aux limites de la démocratie représentative. En effet, cette dernière montre son insuffisance sur certains points comme le fait que certaines catégories socioprofessionnelles ne sont pas représentées au Parlement. Il est souvent reproché aux élus d’être trop éloignés de la vie quotidienne et donc de ne pas comprendre les problèmes rencontrés au quotidien par les citoyens. Or, nos visions sont marquées par nos conditions de vie. Cela induit que bon nombre de citoyens ne se reconnaissent pas dans les élus et rejettent cette démocratie représentative qui ne les représente pas. Toutefois, elle ne vient pas comme une opposition directe à la démocratie représentative mais plutôt comme un complément pour réintroduire dans la démocratie représentative des procédures et des dispositifs qui impliquent les citoyens.

Elle met à disposition des citoyens des moyens pour débattre et faire entendre leurs voix afin qu’ils puissent exprimer leurs avis et que leurs voix pèsent dans les décisions prises qui les concernent. Elle ne peut donc être réduite à une démocratie d’opinion puisqu’elle réunit toutes les conditions pour qu'un débat public et ouvert puisse avoir lieu.

Mais de manière concrète quels sont ces moyens mis en place pour servir la démocratie participative ? Comment les citoyens sont-ils consultés ? Et quel pouvoir leur est-il accordé ?

 

Le fonctionnement d’une démocratie participative

La démocratie participative s’appuie sur la consultation des habitants d’une ville sur les décisions concernant leur quartier ou leur ville. Elle dispose de divers moyens de les consulter mais chacun ne leur donne pas obligatoirement le dernier mot. On distingue en effet, les dispositifs de consultation et de concertation où ils sont invités à donner leur avis de ceux décisionnels comme le référendum.

La consultation

Le droit de consultation est encadré par la loi du 13 août 2004 et du décret 6 de décembre 2005 relatif à la consultation des électeurs. Ces textes indiquent que des consultations peuvent être organisées par un nombre significatif d’électeurs (un dixième) ou par l’assemblée délibérante de la collectivité territoriale concernée.

Cette consultation peut revêtir diverses formes comme :

  • Des enquêtes publiques : Elles ont pour but d’informer le public sur des décisions qui sont susceptibles de toucher l'environnement. Après une présentation du projet, elle doit recueillir les avis, les suggestions et les contre-propositions. Le but est de recueillir l'avis des citoyens sur le projet concerné. Le décideur et les autorités compétentes ont ainsi connaissance de toutes les informations avant de prendre leur décision qui, dans tous les cas, doit prendre en compte les intérêts des tiers.
  • Le débat public : Il doit tout d’abord informer le public sur le projet et ses objectifs puis permettre au public de s’exprimer sur ce sujet. Le débat ainsi mené permet d’éclairer le maître d’ouvrage mais l’avis des citoyens n’est que consultatif. Attention, le débat public doit rester une consultation et ne pas devenir une confrontation.
  • Un scrutin : Les électeurs sont invités à répondre par oui ou par non pour approuver ou non la décision du conseil municipal. Ce dernier décidera ou non de suivre la décision majoritaire des citoyens. Ce type de consultation impose de mettre en place de véritables bureaux de vote et l’usage de la carte électorale.

Par ailleurs, ces consultations ne peuvent avoir lieu que dans un cadre bien précis. En effet, le sujet de la consultation doit relever des compétences du conseil municipal. De plus, elle n’est ouverte qu’aux électeurs.

 

La concertation

Elle résulte d’actions favorisant la transparence sur le projet et la participation des citoyens. Pour qu’une concertation soit dans les règles, elle doit permettre la participation des citoyens et cela passe par le respect de certaines règles comme le fait que le public doit pouvoir s’exprimer en toute liberté et sa concertation doit influencer la décision prise. Il est indispensable que tous les participants puissent avoir toutes les informations sur le sujet traité. Et, il faut faire en sorte que les citoyens les plus concernés par le problème soient présents, c’est pour eux que la concertation est la plus importante.

Il se distingue divers types de concertation :

  • La concertation de communication : Le but est avant tout pour la commune de faire passer des messages. En réalité, les résultats de la concertation importent peu.
  • La concertation structurelle : Elle est organisée dans le cadre d’une structure comme les conseils de quartier dans les grandes villes.
  • La concertation d’engagement : Un dialogue participatif est créé entre les élus et les habitants pour les grandes décisions concernant la gestion de la ville.
  • La concertation de construction : Le décideur souhaite associer la population à son projet de construction. Il veut par la participation des citoyens valider son projet, retravailler certains points…
  • La concertation d’attente : La décision est reportée pour diverses raisons qui peuvent être financières ou politiques.

 

La co-élaboration

Dans la démarche de la co-élaboration, les choses ne sont pas faites pour les citoyens mais avec eux. Ces derniers élaborent les projets avec les élus et ceux-ci doivent se justifier si les décisions prises ne sont pas respectées. Ce mode de consultation est donc réservé aux communes ayant pu instaurer un haut niveau de démocratie participative.

 

Le référendum local

Dans le cas du référendum, celui-ci émane d’une demande des élus locaux et la décision qui en ressortira sera celle qui sera retenue.

L’objet du référendum doit porter sur une des affaires qui concernent la commune. Et, il est interdit au maire d’organiser un référendum qui concerne un acte relevant de ses fonctions. Pour que le projet sur lesquels les électeurs doivent se prononcer soit adopté, il doit avoir réuni la majorité des voix ou si la moitié des électeurs ont pris part au scrutin. L’abstentionnisme peut alors faire pencher la balance d’un côté plutôt que de l’autre.

 

Internet

Avec le développement d'intérêt et la démocratisation de l’ordinateur, une nouvelle forme de concertation des citoyens a vu le jour. Il existe en effet des sites internet et des blogs sur lesquels il est possible d’échanger avec les acteurs des collectivités territoriales. Il est ainsi possible d’y échanger des idées, de faire des suggestions ou encore de bénéficier de conseils. Le tout s'inscrit dans une démarche participative où chacun fait avancer les choses. Grâce à ces échanges, plus de connaissances sont à la portée de chacun et le champ des possibles est élargi. Les élus peuvent également utiliser internet en mettant en place des chats grâce auxquels ils peuvent discuter avec chaque citoyen et répondre à leurs interrogations. Les modes d’interaction avec les collectivités sont multiples. Il suffit que les citoyens aient accès à internet et sachent l’utiliser correctement. Si tel n’est pas le cas, proposer des formations est une solution.

Les outils de démocratie Open Source se sont également développés. Ils garantissent à la population de conserver son droit à l’expression politique. Des initiatives ont été mises au point pour offrir aux citoyens un support où ils peuvent s'exprimer. On peut citer à cet effet Demodyne qui donne la possibilité aux citoyens de co-construire leur ville en votant, en débattant et en fixant les priorités. Chaque administration dispose d’un compte dédié.

 

On recense ainsi bon nombre de moyens de mettre en œuvre la démocratie participative. Les citoyens peuvent s’impliquer à divers degrés dans les décisions prises dans leur commune. Selon le procédé choisi, leur voix peut avoir plus ou moins d’impact.

 

Les enjeux de la démocratie participative

 

Mettre en place une stratégie participative dans sa commune représente de multiples enjeux. Chaque citoyen doit pouvoir faire entendre sa voix et ne plus se faire représenter. Le pouvoir politique des élus n’est nullement remis en cause mais une nouvelle forme de partage se met en place. En effet, l’enjeu est de développer une culture civique. En abordant des sujets par lesquels les citoyens se sentent concernés, leur participation est meilleure et les idées échangées tout autant. Les problèmes sont posés et c’est aux citoyens d’échanger pour parvenir à trouver les meilleures solutions, le tout en concertation avec les élus locaux.

De cela découle une meilleure gestion de la vie locale ce qui constitue le second enjeu de la démocratie participative. Les citoyens ont des savoirs pratiques sur leur commune, les problèmes et ce dont ils ont besoin. Les sujets évoqués sont liés aux modes de vie, aux risques, au développement durable, à leur environnement proche… Des sujets qui les touchent particulièrement et qui peuvent avoir un impact dans leur quotidien. Les élus doivent donc améliorer la communication avec les usagers et les techniciens. Prendre en compte les besoins et des autres entraîne une plus grande tolérance et la création de consensus.

De plus, la participation permet d’avoir plus de transparence envers les citoyens qui comprennent mieux les projets. Les impressions d'inertie ou de corruption des bureaucrates sont ainsi évincées. L’atmosphère ainsi créée est bien plus propice aux échanges qui s’établissent en toute confiance. En effet, le but est que les décisions prises soient les meilleures.

Écouter les usagers, répondre à leurs besoins et leur expliquer la raison de la nécessité de certains projets, tel est l’enjeu de la démocratie participative. Cela permet de redistribuer les savoirs. Les connaissances et les points de vue des citoyens sont revalorisés. C’est le caractère absolu des décisions des experts et des élus qui est remis en cause. Leurs compétences sont reconnues mais leurs décisions peuvent être discutées. Les citoyens étant plus facilement informés qu’auparavant, ils se permettent davantage de questionner et ont un rôle actif. Les savoirs des uns complètent ainsi les savoirs des autres et cela permet d’aboutir à de nouvelles solutions.

La démocratie participative s’appuie sur le bon sens des citoyens et croit en leur capacité de juger et de créer un raisonnement issu d’une opinion éclairée établie grâce à une bonne collecte des informations et une délibération de qualité.

 

C’est dans les municipalités que la démocratie participative est la plus facile à implanter et la plus efficace. C’est à cette échelle qu’elle se diffuse le mieux car les municipalités peuvent aisément susciter la contribution des citoyens. Elles disposent pour cela de nombreux outils qu’ils soient consultatifs ou décisionnels qui vont des discussions de groupe à la création de plateforme collaborative en ligne. La réussite de la démocratie participative dépend du professionnalisme et de l’éthique des acteurs qui sont indispensables pour atteindre les objectifs de cette démocratie et qu'elle soit utilisée dans le but de servir l’intérêt général.